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Dans sa chronique, Frédéric Potet, journaliste au « Monde », se penche sur les noms des nouvelles municipalités issues de la fusion de plusieurs communes.

Chronique. Sur la route des vacances, les toponymistes sont à la fête, depuis quelques années. Les dispositifs favorisant les fusions de communes offrent une matière première inédite aux linguistes spécialisés dans l’étude étymologique des noms de lieux. En engendrant 785 municipalités nouvelles depuis son adoption, la loi du 16 mars 2015 relative « à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes » a ainsi écrit autant de nouveaux noms sur la carte de France. Des noms parfois cocasses, poétiques pour certains, fruit de consensus complexes pour d’autres. Des noms originaux à tout le moins, qui esquissent l’aménagement territorial de demain.

Exemple à Cherré-Au. « Cherré quoi ? »,s’étoufferont peut-être les géographes amateurs de la Sarthe. Créée le 1er janvier 2019, cette commune nouvelle est née de la fusion de Cherré (1 700 habitants) et Cherreau (900 habitants), deux villages limitrophes à l’appellation voisine (Cherreau signifiant « le petit Cherré », selon l’histoire locale). Après avoir décidé de ne faire qu’un, les deux conseils municipaux ont longtemps phosphoré ensemble, afin d’adopter un nom commun ; une commission ad hoc a même été créée, avant que la population soit invitée à donner son avis par un référendum.

Le résultat est cette bizarrerie pour l’œil, avec un trait d’union intercalé entre le nom du chef-lieu et un suffixe inconnu. La dissonance le serait toutefois moins à l’oreille, selon Michel Landais, le maire de Cherré-Au (et ancien maire de Cherré) : « On s’y fait facilement, assure-t-il. Nous ne voulions pas d’un nom artificiel qui aurait consisté à ajouter “au-Perche” à la fin de la commune la plus importante, vu que nous ne sommes pas dans le Perche, ou “sur-Huisne”, la rivière qui coule chez nous. Il fallait que ce soit à la fois innovant et respectueux du passé. »

L’Etat a le dernier mot

La chance de Cherré-Au est d’être la combinaison de seulement deux communes existantes. La recherche lexicale devient beaucoup plus complexe, en revanche, quand trois, quatre, voire davantage de clochers décident de s’unir sous une même bannière, comme l’a observé Stéphane Gendron, membre de la Société française d’onomastique (branche de la lexicologie ayant pour objet l’étude des noms propres) : « Depuis 2015, on assiste à la création de noms reposant sur des modes de formation pour le moins déroutants, en particulier ceux qui consistent à former des toponymes-valises ou des toponymes formés d’abréviations syllabiques. »


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