Redoutant l’incertitude post-Brexit et l'absence d’un accord avec l’Union européenne d’ici mars 2019, certaines grandes fortunes britanniques, pourtant partisanes de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne ont décidé de quitter le pays.
Tant pis pour ceux qui ont cru en la sincérité de Jim Ratcliffe, première fortune du Royaume-Uni. Début août, celui qui appelait en 2015 à voter en faveur du Brexit a annoncé son départ pour Monaco, principauté qui l'exemptera d'impôts. Une lourde perte pour Londres : l'homme n'est autre que le président d'Ineos, un géant de la pétrochimie, et pèse 23,5 milliards d'euros, selon le Sunday Times. Il ne part pas seul. Le directeur et le directeur financier d'Ineos, Andy Currie et John Reece, également milliardaires, ont décidé de lui emboîter le pas. Le siège de l’entreprise et son chiffre d’affaires annuel de 52 milliards d’euros resteront, eux, à Londres.
Alors que les négociations post-Brexit entre le Royaume-Uni et l’Union européenne (UE) traînent, sans aucune certitude sur un accord, la liste des riches partisans du Brexit, qui préfèrent assurer leurs arrières, s'allonge. En juin, déjà, Jacob Rees-Mogg, chef de file des députés pro-Brexit, avait choisi Dublin, en Irlande voisine, pour lancer deux fonds d’investissement, craignant que sa société de gestion Somerset Capital Management (SCM) soit coupée des investisseurs européens, une fois le Royaume-Uni sorti de l'UE. “Comme la société est basée au Royaume-Uni et que les investissements d’un fonds peuvent être situés au Royaume-Uni ou dans l’UE, un fonds peut en conséquence pâtir des événements’’ liés à l’incertitude du Brexit, a justifié SCM dans un prospectus.
Embarrassé, Jacob Rees-Mogg qui est également le président du European Research Group (ERG), puissant groupe eurosceptique conservateur, s’est tant bien que mal défendu de cette décision dans les colonnes du Daily Telegraph : “Un certain nombre de clients ont demandé un accès à domicile aux produits de Somerset. La décision n’avait rien à voir avec le Brexit”.
Un choix logique
Défendre une rupture avec l’Union européenne et ensuite transférer sa fortune à Monaco n’a rien de contradictoire, pour Jim Ratcliffe, dont l’entreprise spécialisée dans l’exploitation du gaz de schiste a près de 171 sites dans 24 pays en Europe et en Asie et emploie 18 000 personnes. Conformément à sa vision du Brexit, qui n’est pas celle d’un retranchement mais “d’une plus grande liberté législative et bureaucratique”, comme il l’explique dans sa récente autobiographie "The Alchemists", cela est même logique.
La première fortune britannique, qui veut se diversifier dans le secteur automobile avec pour objectif de donner un successeur au célèbre 4x4 Land Rover Defender, a toujours eu une dent contre les impôts. Les questions fiscales l'avaient déjà poussé à délocaliser le siège de son entreprise en Suisse en 2010, avant de le rapatrier à Londres en 2016, à la suite de la baisse de l’impôt sur les sociétés mise en place par le gouvernement de David Cameron.
Le Royaume-Uni doit quitter définitivement l’Union européenne, le 29 mars 2019. Londres veut accélérer les négociations “sur les relations futures” entre les deux blocs. Le ministre britannique chargé du Brexit, Dominic Raab, se rendra mardi 21 août à Bruxelles pour rencontrer le négociateur européen Michel Barnier. En outre, Dominic Raab prononcera un discours dans lequel il exposera les projets de Londres pour assurer la stabilité du Royaume-Uni en cas de Brexit sans accord.
Un nouveau référendum
Deux ans après le vote, les Britanniques sont divisés. Et même au sein du gouvernement de Theresa May, les dissensions sont profondes entre europhobes et europhiles, notamment sur la question de la frontière irlandaise. Fin mars 2019, une frontière “dure” risque d’être rétablie entre la République d'Irlande, membre de l'UE, et l'Irlande du Nord, province britannique, qui sortira de l'UE après le Brexit.
Des voix se sont d’ores et déjà élevées pour réclamer un nouveau référendum. Julian Dunkerton, cofondateur de la marque de prêt-à-porter Superdry a annoncé dans le Sunday Times avoir donné 1 million de livres (plus de 1,1 million d’euros) aux organisateurs d’une campagne populaire "People's vote", initiée vendredi 10 août en faveur d’un nouveau vote sur le Brexit. Selon lui, ce sera “un désastre” et “nous avons une véritable chance de renverser la situation’’.
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