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Départ anticipé, âge légal, âge d’équilibre… Voici six cas concrets pour comprendre ce qu’impliquent les recommandations du haut-commissaire Jean-Paul Delevoye, dévoilées jeudi.

A quel âge pourrai-je arrêter de travailler ? Tout citoyen en activité se pose forcément la question à un moment ou à un autre de sa carrière. Et ce d’autant plus que l’on commence à connaître avec précision les contours de la réforme des retraites voulue par le président de la République Emmanuel Macron.

Les recommandations présentées par le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye, jeudi 18 juillet, nous en disent plus sur les conditions dans lesquelles les travailleurs pourront prétendre prendre leur retraite en France.

Ces règles s’accompagnent d’une certaine complexité technique. Elles établissent un système de retraites par répartition, organisé « par points » ; quant à l’âge légal de départ – inchangé sur le papier –, il sera complété par un « âge d’équilibre » qui entrera dans le calcul des futures pensions.

Les Décodeurs vous proposent six cas fictifs mais concrets pour comprendre ce qu’il en est.

1. François veut partir au plus vite

Emmanuel Macron s’y était engagé en 2017 : l’âge légal du départ en retraite restera fixé à 62 ans dans le cadre de la réforme engagée par le gouvernement d’Edouard Philippe. François, cadre en entreprise né en 1969, pourrait donc terminer sa carrière en 2031, malgré la mise en place du futur régime universel que M. Delevoye propose de faire débuter au 1er janvier 2025. 

Le calcul de la pension de François sera fait à partir despoints accumulés par le salarié tout au long de sa carrière, qui correspondent à ses cotisations retraite (1 point pour 10 euros de cotisations). Ces points sont convertis en pension de retraite au moment du départ, suivant un coefficient – qui serait de 0,55 euro en 2025. Par exemple, 40 000 points correspondraient à 22 000 euros annuels, soit 1 830 euros brut par mois de pension environ.

Sauf qu’en partant à 62 ans, François touchera une pension dévaluée. La réforme prévoit en effet la mise en place d’un « âge d’équilibre », qui sera au départ fixé à 64 ans et évoluera au fil du temps en fonction de l’espérance de vie.

Avant cet âge, le calcul de la pension se fera selon une formule moins favorable : la valeur du point sera diminuée de 5 % par année de départ anticipé. En partant à 62 ans au lieu de 64 ans, François pourra donc prétendre à une retraite inférieure de 10 % à celle d’un salarié qui aura autant cotisé que lui, mais qui partira à l’âge de 64 ans.

2. Camille veut s’assurer une retraite confortable

Camille, elle, a peur de manquer d’argent une fois à la retraite. Cette employée du secteur privé a fait ses comptes et les 1 200 euros brut par mois de pension auxquels elle pourrait prétendre en partant à 62 ans en 2031 ne lui suffisent pas. En travaillant jusqu’à 66 ans, elle verra sa retraite augmenter de deux manières :

  • ces quatre années de travail supplémentaires feront qu’elle aura plus de points ;
  • son point aura une valeur supérieure. Alors qu’il est déprécié de 10 % pour un départ à 62 ans, il est à l’inverse majoré de 10 % pour un départ à 66 ans, deux ans après l’âge d’équilibre (chaque année de cotisation en sus augmente la valeur du point de 5 %).

A l’arrivée, Camille a calculé qu’elle devrait toucher une retraite de l’ordre de 1 500 euros, et non plus de 1 200 euros, en travaillant quatre ans de plus. Comme elle, de nombreux travailleurs pourraient à l’avenir partir à 64 ans, 66 ans ou même plus tard encore, sans y être formellement contraints.

3. Danièle a longtemps travaillé à temps partiel

Danièle a travaillé à temps partiel, qui plus est au salaire minimum, pendant la totalité de sa carrière, sans jamais rester longtemps au chômage. En théorie, son nombre de points ne lui garantirait qu’une retraite de l’ordre de 700 euros par mois en partant à 64 ans, en 2030. Mais une retraite minimale est prévue pour les personnes dans sa situation, qui serait de l’ordre de 85 % du salaire minimum net.

Pour y prétendre, il faudra avoir effectué une « carrière complète ». Pour la génération 1973, cela correspondrait au fait d’avoir validé au moins 43 années de travail en ayant cotisé au moins 600 heures de travail au salaire minimum (la même règle que dans le calcul des annuités aujourd’hui). Impossible, en revanche, de prétendre à ce niveau de retraite minimum avant l’âge du taux plein. Danièle préfère donc attendre 64 ans plutôt que de toucher une trop faible retraite.

Pour ceux qui, contrairement à elle, n’auront pas suffisamment cotisé, le niveau de retraite minimum sera calculé en proportion des années de cotisations. Et pour les moins bien lotis, l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) continuera d’exister – elle est aujourd’hui de 868 euros par mois pour une personne seule.

4. Frédéric a un travail pénible

Frédéric est un ouvrier qui travaille dans des conditions de températures extrêmes, dont la pénibilité est reconnue. Selon les préconisations du rapport Delevoye, sa situation serait prise en compte dans le cadre de la future réforme des retraites. Le rapport prévoit en effet que des points « pénibilité », distincts de ceux qui entrent dans le calcul de la pension, soient attribués aux travailleurs dans cette situation.

Ces points permettraient par exemple d’obtenir des droits à des formations pour accéder à des postes moins pénibles, de passer à temps partiel sans perte de salaire ou de partir à la retraite jusqu’à deux ans plus tôt. En théorie, Frédéric pourrait donc prétendre à une retraite anticipée à 60 ans – reste à savoir dans quelles conditions financières.

5. Sophie veut partir à la retraite en 2024

Sophie aura 62 ans en 2024. Un âge qui lui permet de partir à la retraite dans le cadre du système actuel. Comme la réforme ne s’appliquerait qu’à partir de janvier 2025, ceux qui comptent arrêter leur activité avant cette date le feront donc dans les conditions actuelles.

La possibilité, un temps évoquée par le gouvernement, de reculer l’âge du départ à la retraite sans attendre la réforme, dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2020, a finalement été écartée. Sauf revirement, les règles du jeu ne changeront donc pas avant la réforme qui doit aboutir à un régime « universel ».

6. Brice, 29 ans, se demande s’il aura une retraite

Si la réforme envisagée ne prévoit pas de reculer l’âge légal du départ à la retraite, le nouvel « âge d’équilibre »pour pouvoir prétendre toucher une pension sans décote aura quant à lui vocation à évoluer au fil des années en fonction de l’espérance de vie.

Selon les estimations du rapport de Jean-Paul Delevoye, il serait fixé en 2025 à 64 ans, mais serait de 65 ans et 5 mois environ pour la génération 1980 et de 66 ans et trois mois pour la génération 1990 à laquelle appartient Brice.

A cet horizon, ceux qui souhaiteront partir à la retraite dès 62 ans, soit quatre ans avant l’âge d’équilibre, se verraient appliquer un malus non plus de 10 % mais de 20 %. Là encore, le paramétrage du système incitera de plus en plus à reculer l’âge de son départ.

Prudence tout de même : pas moins de sept réformes des retraites ont été adoptées ou envisagées en France depuis les années 1990. Rien ne dit donc que le système imaginé par le gouvernement actuel sera celui qui prévaudra dans les années 2050, quand Brice aura l’âge de toucher une pension.


Source : Avec la future réforme, à quel âge sera-t-il possible de partir à la retraite ?


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