"Asura" devait montrer que le cinéma chinois était capable de concurrencer Hollywood dans toute sa démesure. Mais ce film s'est révélé être l'un des plus grands flops du cinéma mondial, tout en étant le film le plus cher de l'histoire chinoise.
Des effets spéciaux à foison, des scènes de combats dignes du "Seigneur des anneaux" version kung-fu, une héroïne aux faux airs de Daenerys dans "Game of Thrones" et un budget de plus de 100 millions de dollars n’ont pas suffi. "Asura", le film le plus cher de l’histoire du cinéma chinois, est devenu l’un des échecs commerciaux les plus retentissants de l’histoire du cinéma mondial.
Cette fresque sur fond de mythologie bouddhiste a été retirée des salles obscures en Chine, lundi 16 juillet, après un premier week-end d’exploitation catastrophique. Le film n’a généré que 7 millions de dollars de recettes, très loin des attentes des producteurs, dont le plus grand studio de cinéma au monde Hengdian World Studio et le mastodonte chinois de l’Internet Alibaba. Ils espéraient prouver avec "Asura" que Chinawood jouait désormais dans la même cour qu’Hollywood.
Des stars, de l’argent et le soutien de Pékin
Les ambitions du cinéma chinois reposaient à l’écran sur les frêles épaules d’un jeune berger qui se retrouve entraîné dans une quête pour sauver un monde mythique, menacé de destruction par un sombre complot. À coup de prises de kung-fu et avec l’aide de Zhang Yishang, une actrice chinoise populaires, le jeune héros, incarné par Wu Lei, idole des jeunes chinois, va déjouer les sombres machinations ourdies par Tony Leung Ka-fai, un monument du cinéma hongkongais dans le rôle du grand méchant.
Les producteurs semblaient donc avoir coché toutes les cases pour réussir un blockbuster : des stars incontestés, un budget record, et un scénario épique glorifiant la “culture chinoise”, d’après l’un des studios à l’origine du projet. L’équipe pléthorique du film, composée de 1 800 professionnels venus de 35 pays, était censée apporter la touche de savoir-faire international.
Les autorités chinoises avaient même adoubé officiellement le film. Des représentants du parti communiste chinois avaient vanté les mérites d’"Asura" à l’occasion de la première du film à Pékin samedi 15 juin, a relaté le Quotidien du peuple, l’organe de presse officiel du régime.
Ambitions chinoises contrariées
Mais ce rouleau compresseur commercial s’est heurté au mur des critiques des spectateurs. Les avis négatifs se sont rapidement multipliés sur deux influents sites chinois de cinéma, décourageant le public d’aller voir cette fresque de 2 h 20. Une catastrophe industrielle qui place "Asura" parmi les cinq plus gros flops de l’histoire du cinéma derrière des films comme "John Carter" (122 millions de dollars de pertes) ou encore "Le Roi Arthur : la légende d’Excalibur" (115 millions de dollars de pertes).
Les producteurs ont été prompts à dénoncer lundi un “sabotage” qui serait l’œuvre de Tencent, le principal concurrent d’Alibaba et propriétaire de l’un des sites sur lequels sont apparues le plus de critiques négatives de spectateurs.
Malgré cette polémique de dernière minute, la production a été obligée de reconnaître l’échec commercial et d’arrêter les frais… pour l’instant. Les responsables d’Hengdian World Studio ont annoncé leur intention d’apporter “quelques changements” au film pour le relancer “plus tard”.
Car ils ne peuvent guère se permettre de rester sur un tel échec. Le giga-complexe cinématographique d’Hengdian World Studio a ouvert ses portes en avril 2018 avec comme ambition assumée de prouver que la Chine n’est pas seulement un marché à conquérir pour Hollywood, mais peut aussi produire des œuvres capables de s’imposer sur la scène internationale. Le géant chinois Wanda Group, propriétaire d’Hengdian World Studio, a dépensé 6,5 milliards d’euros pour transformer 376 hectares de terrain en usine géante à films. Difficile de se lancer à l’assaut du monde si leur premier projet d’envergure, "Asura", reste dans les annales cinématographiques comme l’une des plus importantes catastrophes commerciales du 7e Art.
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