Autour d’Emmanuel Macron gravitent des personnages aux parcours atypiques. Bien qu’absents de l’organigramme officiel, leurs rôles ont été mis en évidence par les révélations sur Alexandre Benalla.
En cette chaude soirée du 18 juillet 2018, les téléphones personnel et professionnel d’Alexandre Benalla vibrent et sonnent sans répit. Le Monde vient de révéler que cet adjoint au chef de cabinet du président de la République a molesté un couple de manifestants, le 1er mai à Paris. « Mon affaire va sortir », répète-t-il depuis le début de l’après-midi à ses collègues de l’Elysée. Etrangement, alors que le scandale éclate, il affiche une forme de flegme et ne change rien, du moins en apparence, à ses habitudes. Il passe la soirée avec un vieux copain, Vincent Crase, celui-là même qui l’accompagnait cet après-midi du mois de mai dans le Quartier latin pour « observer » les techniques de maintien de l’ordre.
Crase a rencontré Benalla dans la gendarmerie – ils étaient tous les deux réservistes dans l’Eure –, puis a travaillé avec lui dans la sécurité privée avant de le suivre au service d’ordre de la campagne d’Emmanuel Macron. Cet été 2018, il est employé à la sécurité du siège de La République en marche (LRM) et effectue parfois des missions à l’Elysée au sein de la Garde républicaine. En fin de soirée, le duo quitte l’hôtel du Collectionneur, un palace de la rue de Courcelles, dans le 8e arrondissement de Paris, et gagne le Damas Café, un bar à chicha de la rue du Colisée, à trois pâtés de maison du palais présidentiel. Benalla se rend presque chaque soir dans ce bar. Il a sa place, à gauche près de l’entrée.
C’est dans la tempête, paraît-il, qu’on reconnaît ses amis. Le jeune homme peut être rassuré. Dans la longue liste de ses interlocuteurs téléphoniques établie par les enquêteurs, on trouve, ce soir-là, des célébrités comme Christian Prouteau, le fondateur du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et l’ex-patron des fameux « gendarmes de l’Elysée » du temps de François Mitterrand ; ou encore Thierry Légier, le garde du corps de Jean-Marie Le Pen puis de sa fille Marine. Mais ce sont d’autres échanges qui retiennent aujourd’hui l’attention : les appels – émis ou reçus – avec ses collègues de l’Elysée.
Ismaël Emelien, le « M. Crises »
Discret conseiller spécial du président,Ismaël Emelien, l’homme qui a théorisé le macronisme et imaginé la stratégie victorieuse de la présidentielle, est un des principaux interlocuteurs de Benalla durant cette nuit interminable. Au palais, M. Emelien se charge notamment de la veille des médias et de la riposte aux polémiques susceptibles de menacer le chef de l’Etat – ce qu’on appelle la « com’ de crise ». Or, ce 18 juillet, à en juger la salve de coups de téléphone échangés et le vent de panique qui s’installe, crise il y a.
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