Sur les routes, les poteaux électriques se relèvent les uns après les autres du passage d’Irma. Le courant est revenu dans quelques maisons et lotissements. Internet aussi, pour les mieux équipés. Certains habitants revivent. Mais l’arrivée de l’eau prendra beaucoup de plus de temps. Gendarmes et bénévoles continuent de distribuer des packs à la population. On continue de se laver comme on peut. Pour les plus privilégiés, à l’aide d’un sceau, plongé dans les piscines, au fond desquelles, souvent, on trouve des morceaux de tôle, de bois et détritus divers. L’eau est verdâtre, mais pas polluée, il arrive même qu’on s’y trempe. Deux ou trois magasins ont rouvert, ceux qui n’ont pas été impactés par Irma, ni pillés et qui possédaient des générateurs. L’on voit ça et là des coffres de voitures remplis de victuailles et des mères de familles ravis de remplir leurs frigos. On trouve de tout, mais cela reste assez cher. Les plus démunis ressortent avec seulement quelques paquets de pâtes, du sucre, une bouteille d’huile. Pour le pain, il faut encore faire trois heures de queue dans les rares boulangeries ouvertes. Une seule des 8 pharmacies détruite a rouvert ses portes.
Mercredi en début d’après midi, sept hors bord de pêche ont accosté dans le port de Marigot, quai des Eleveurs. A bord de chacun d’eux, deux tonnes de vivres. Ils arrivaient tous de Point à Pitre, après 9 heures de traversée. Capitaine de l’un des sept, Roudy, fier de participer à cette distribution dont l’origine est bénévole.
Les bateaux submergés à Saint-Martin après le passage de l'ouragan Irma.Enrico Dagnino/Paris Match
On attend les écoles en préfabriqué
Sur l’ile, aucun établissement scolaire n’est en état de fonctionner. On attend les écoles en préfabriqué du continent. D’ici là, il faut occuper les enfants, parfois traumatisés par ce qu’ils sont vécu et qui se réveillent après une nuit de cauchemars. Il faut être disponible et leur sourire, alors que les adultes eux-mêmes ont pensé mourir. Les habitants se confient encore entre eux leurs souvenirs de ces heures passées enfermés très souvent dans la partie la plus solide des maisons : toilettes ou salles de bains, construits en béton, comme des mini abris anticycloniques.
C’est à l’hôtel Mercure de Marigot que Fabrice, qui gère les Monoprix de l’ile et sont fils Irvin, qui vient de passer son bac à St Martin, sont venu se réfugier, leur appartement étant trop exposé. Une vague gigantesque a détruit la baie vitrée renforcée de l’hôtel, il a fallu monter dans les étages. La encore, tout cédait, petit à petit. Irvin a dit à son père «On va y passer, moi, je sors.» Mais il est resté, a tenu bon, cramponné dans une salle de bain, mais il reste encore visiblement très marqué par cette incroyable expérience. Son père et lui ont des amis dont un enfant de cinq ans a été emporté par le vent, du toit d’une maison. Est-ce celui retrouvé sans tête par l’envoyé spécial d’Europe 1 sur une plage ? Mystère. Comme est un mystère cette plaque funéraire de 60 cm sur 60 pesant 6 kilos environ, portant le nom d’une femme enterrée à St Barth et qui a atterri dans le jardin d’un résident de Mont-Vernon 3, à St Martin. A l’hôpital, une cellule psychologique a été ouverte pour accueillir les plus atteints psychologiquement. Une quinzaine de médecins pour des dizaines de visites quotidiennes.
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