Si les taux de grévistes reculent lentement, les transports sont encore largement perturbés et la base syndicale, déterminée.
« Cela ressemble à une lente décrue. Comme si la Seine avait tout envahi et mettait un temps infini à se retirer. » L’image est choisie par un haut cadre de la RATP. Elle décrit avec une certaine justesse la situation des deux grands groupes nationaux de transport public – SNCF et RATP –, dont les salariés sont en première ligne dans le conflit contre la réforme des retraites et la disparition de leur régime spécial.
Décrue donc puisque, jour après jour, les taux de grévistes sont en recul après avoir atteint des niveaux « stratosphériques » (plus de 90 % des conducteurs SNCF) au début du mouvement, le 5 décembre. Au vingt-quatrième jour du conflit, samedi 28 décembre, les déclarations individuelles d’intention de faire grève à la SNCF laissaient présager un taux de conducteurs en grève de 37 % pour le week-end. A la RATP, le service s’améliore : des lignes de métro, jusqu’ici complètement fermées, rouvrent partiellement, certaines lignes de tram affichent un trafic normal.
Mais ce mieux se fait à une vitesse d’escargot. Les perturbations des RER et trains de banlieue créent encore des engorgements pour les usagers dans les grandes gares parisiennes. « Il y a des reprises individuelles, c’est vrai, glisse un cadre de la SNCF. Mais si nous améliorons significativement nos circulations de TGV (six sur dix) en ce week-end de chassé-croisé, c’est d’abord parce que nous avons accompli un effort colossal d’organisation. » Après le week-end, ce sera d’ailleurs à nouveau la rechute. La SNCF prévoit de faire circuler entre 45 % et 50 % des TGV en moyenne lundi et mardi, 35 % le 1er janvier et 50 % le 2 janvier.
Il s’installe une routine de la grève, avec des points d’appui très forts et des disparités entre grévistes. Par exemple, les taux d’arrêt de travail chez les conducteurs SNCF sont encore de 81 % sur le trafic banlieue de Paris-gare de Lyon, ou de 57 % dans les TER de la région PACA, alors qu’en Bretagne, ce même ratio tourne autour de 10 % et qu’il descend à 7 % sur les TGV de Paris-Nord.
« Je suis optimiste »
Alors, jusqu’à quand ce conflit peut-il durer ? Dans les assemblées générales, là où les activistes, principalement de la CGT, de SUD, de FO et parfois de l’UNSA, animent la flamme gréviste, on croit encore à la victoire, c’est-à-dire au retrait total du projet, comme en 1995. « Je suis optimiste. Tout le monde a conscience qu’on est à pas grand-chose de gagner, dit Emmanuelle Bigot, déléguée SUD à Paris gare de l’Est. Certains ont repris le travail pendant les fêtes parce que financièrement il faut tenir, mais quand je les croise, ils me disent qu’ils vont repartir dans le mouvement. » Pour ces militants, pas de doute, il y aura un rebond du conflit à la rentrée de janvier. En attendant, on reconduit la grève unanimement, on partage des repas festifs, on manifeste, comme ce 28 décembre, un peu partout en France.
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